Titre : Sans titre, 1955
Technique et support : Eau-forte sur papier
Particularités de l'oeuvre : Estampe originale signée à la main par l'artiste au crayon en bas à droite et annotée "épreuve d'essai". Cette oeuvre est une édition supplémentaire à grandes marges de l'illustration 13 du livre hommage à Eluard "un poème dans chaque livre" édité en 1956 à 120 exemplaires. Dans le livre l'illustration 13 est positionnée à côté du poème de Paul Eluard "Je croyais le repos possible" tiré de "Les yeux fertiles" (1936). L'oeuvre ici proposée provient de l'album dit "Album A", Tiré à part du livre à 20 exemplaires. Chaque album contient comme le livre 16 estampes (dont cette oeuvre de Jacques Villon ) m ais elles ont été tirées à grandes marges et contrairement aux estampes du livre, toutes signées ou monogrammées par les artistes. L'album que nous possédons était la propriété de l'éditeur Louis BRODER. Il se distingue des autres car il est enrichi en plus des 16 illustrations à grandes marges de nombreuses autres estampes recueillies par l'éditeur tout au long de sa collaboration avec les artistes sur ce livre.
Dimensions : 32 x 25 cm (image 15 x 15 cm)
Etat : Bon, deux petits trous quasi invisibles d'à peine 0,1 mm, sans doute liées à la matrice d'impression de l'estampe mais qui seront tatolement invisibles à l'encadrement. Voir photo 5
Provenance : Collection Genevieve et Jean Paul Kahn
Commentaire de l'expert : Depuis très jeune, Jacques Duchamp dit Jacques Villon réalise des estampes, son médium de prédilection. Influencé successivement par tous les grands mouvements de l’art moderne (impressionnisme, cubisme, surréalisme…) l’artiste garde son indépendance d’esprit et un style qui lui est propre. Il s'installe en 1906 rue Lemaître à Puteaux avec son frère Raymond Duchamp-Villon et Frantisek Kupka. Cet atelier deviendra un point de rencontre d'une partie de l'avant-garde parisienne avec entre autres Marcel Duchamp (son frère), Francis Picabia, Fernand Léger, Robert Delaunay . Ils formeront le « groupe de Puteaux » ou « section d'or ». En 1913, il participe à l'Armory Show à New York où son frère Marcel Duchamp causa un scandale célèbre en présentant son « Nu descendant l'escalier », puis après la guerre, il se consacre à l’abstraction. Ce n’est qu’à partir des années 40 que son oeuvre est reconnue alors qu’il a déjà beaucoup produit. Ces années marquent aussi le début de sa collaboration avec les plus grands écrivains contemporains dont Paul Eluard mais aussi André Frénaud, Robert Ganzo, Tristan Tzara et Henri Pichette. Sa contribution au livre hommage sur Paul Eluard « un poème dans chaque livre » est l’une des plus étonnantes et interessantes. En effet, l’artiste interprète à sa manière le poème « je croyais le repos possible » et représente la lassitude, la solitude, la vieillesse, les souffrances de l’homme qui ne connaissent aucun repos et le conduisent à l’image de la ruine indubitablement à la mort ne laissant que le squelette. Ce squelette courbe « le dos » et marche « tête » baissée comme l’homme sous poids d’un labeur qu’il subit au regret de ne pas avoir pris sa destinée en main, de ne pas avoir osé sortir de la vie bien balisée proposée par la société. Il est comme cette vache tirée du bestiaire surréaliste, qui manipulée par l’homme ne fait qu’obéir et subir. L’oeuvre de Villon tout comme le poème de Paul Eluard, est d’une expressivité incroyable et permet, comme aiment à le faire les surréalistes, de montrer la vie de l’esprit. Seules lueurs d’espoir, la lumière évoquée dans le poème et les couleurs douces de l’artiste. Pourquoi Villon a-t-il choisi ce poème ? Peut-être est-ce en lien avec sa propre carrière d’artiste et cette reconnaissance tardive dont il a bénéficié ? J’apprécie d’ailleurs cette déclaration de l’artiste « ce qui est difficile en peinture, ce sont les 70 premières années...»
L'Album et le Livre :
Photo explicative 1 : Comparaison entre l'Album A tiré à part de "un poème dans chaque livre" tiré à 20 exemplaires et le livre "un poème dans chaque livre" tiré à 120 exemplaires. Photo explicative 2 : Album A tiré à part à 20 exemplaires ayant appartenu à l'éditeur Louis Broder contenu dans une boite en toile grise avec étiquette collée sur le dos et le premier plat. Photo explicative 3 : Justificatif de tirage de l'Album A qui indique le nombre d'exemplaires maximum d'estampes contenu au total dans les 20 albums ainsi que les noms des artistes. Il est annoté au crayon rouge "exemplaire de l'éditeur B" car il a appartenu à Louis Broder. Photo explicative 4 : Estampe originale signée et tirée à grandes marges de Pablo Picasso , contenue dans l'album A Photo explicative 5 : Estampe originale signée et tirée à grandes marges de Max Ernst, contenue dans l'album A Photo explicative 6 : Livre "un poème dans chaque livre" tiré à 120 exemplaires, contenant les 16 estampes non signées par les artistes (signatures sur le justificatif de tirage du livre) Photo explicative 7 : Estampe de Pablo Picasso à double page, non signée contenue dans le livre "un poème dans chaque livre" Photo explicative 8 : Estampe de Max Ernst non signée contenue dans le livre "un poème dans chaque livre"
Pour découvir en images l'histoire de l'Album A et des rares estampes qu"il contient cliquer sur la vidéo ci-dessous !
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Biographie de l'artiste : Jacques Villon, de son vrai nom Gaston Emile Duchamp, est né en 1875. Issu d’une famille d’artiste, Il pratique dès l’âge de 16 ans la gravure. En 1894, il s’installe dans le quartier Montmartre, où en parallèle de ses études de droit, il suit des cours aux Beaux-Arts de Paris. Sa carrière débute en tant que caricaturiste et illustrateur pour la presse parisienne. Dans ce même temps, sans réellement appartenir à un mouvement particulier, il décide de se consacrer entièrement à la peinture. Si son travail a particulièrement marqué les esprits durant la période cubiste, où il propose une démarche différente des autres artistes, en jouant davantage sur le dynamisme et les couleurs, Jacques Villon a également participé aux élans du fauvisme et de l’impressionnisme abstrait. Son succès traversera l’Atlantique et le Musée d’art Moderne de Paris ajoutera à sa collection une de ses œuvres
Histoire du livre et de l'album : Nous vous conseillons de lire notre blog "L'ALBUM A DE LOUIS BRODER : UN PORTFOLIO LEGENDAIRE".
A propos de Paul ELUARD : Nous vous conseillons de lire notre blog "PAUL ELUARD : L'ELU DE L'ART".
Quelques vers du poème "Je croyais le repos possible":
Une ruine coquille vide
Pleure dans son tablier
Les enfants qui jouent autour d’elle
Font moins de bruit que des mouches
La ruine s’en va à tâtons
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